Au-delà de 20 salariés chaque entreprise est soumise à l’obligation légale d’emploi de 6% de travailleurs handicapés. Entre méconnaissance du handicap et actions de sensibilisation, en 2012 le handicap en entreprise ça veut dire quoi ? 

Pascal Fert, handicapé de naissance et créateur de Candicap conseil, cabinet de recrutement spécialisé dans le handicap, estime « qu’il faut travailler sur la méconnaissance du handicap. » Notamment à l’égard du handicap dit « invisible». « En France, un cadre reconnu travailleur handicapé pense automatiquement que son plan de carrière est mort. C’est l’image des personnes handicapées qu’il faut changer. Il ne faut plus avoir peur de montrer et créer le buzz au sein de l’entreprise ».

Sensibiliser

D’où des actions de sensibilisation récurrentes dans toutes les grandes entreprises, pour ne plus avoir peur de montrer, de dire. Pendant la Semaine pour l’emploi des personnes handicapées, GDF Suez organise un serious game sur le handicap « non visible » et des ateliers artistiques pour que chaque collaborateur puisse s’exprimer sur le handicap.  Les salariés pourront également se faire masser par des kinés non-voyants dans l’espace « bien-être » installé dans les bureaux. « Une façon d’échanger sur les difficultés rencontrées par  les personnes non-voyantes pour arriver jusqu’à nos bureaux » précise Bernard Navas, chargé de mission handicap et diversité pour GDF SUEZ.

Chez Bouygues, ce sont tous les magasins qui ont été repensés pour que la politique en faveur du handicap soit bénéfique aux clients comme aux collaborateurs.

Le jeudi 10 octobre, Veolia Eau a organisé une opération de présentation des métiers de l’eau aux personnes en situation de handicap et de sensibilisation interne. « Nous cherchons à faire connaître à des étudiants handicapés les métiers de l’eau pour qu’à la sortie de leurs études ils n’hésitent pas à penser à notre groupe. D’autre part, nous avons jugé important de démystifier le handicap au sein de nos équipes : en effet, il suffit simplement de petites adaptations pour que les personnes handicapées expriment leurs compétences » souligne Jean-Bernard Naffrechoux, responsable de la Mission Handicap chez Veolia Eau.

Les stéréotypes ont la vie dure

Accords handicap, ateliers de sensibilisation, forums emploi, ou encore tutorat de personnes handicapées… Les plus grandes entreprises  s’investissent aujourd’hui dans une politique handicap d’envergure, mais restent confrontées à la réalité : les stéréotypes persistent face aux compétences individuelles. Les résultats de l’étude de IMS-Entreprendre pour la Cité portant sur la perception de 400 managers sont éloquents : le handicap reste très peu associé au monde du travail et sa perception est souvent caricaturale. Pour les managers, le handicap est forcément visible alors que 85% des handicaps sont en fait invisibles. Les managers ont une vision plus grave du handicap qu’il ne l’est en réalité.

S’inspirer du modèle anglo-saxon ?

En France, la différence dérange encore. Au point que les clichés en noir et blanc représentant la différence due au handicap réalisés par l‘association Afrik’DEZ’Arts n’avaient pu être affichés à l’arrière des bus parisiens, car jugés « trop » dérangeants … Aux Etats-Unis, une société d’appareils auditifs s’est volontiers servie de Ronald Reagan himself comme support à sa campagne de pub : un Président à moitié sourd ? Oui ça existe, la preuve.  « Chez les Anglo-saxons, il n’y a pas de loi mais une jurisprudence. Seul le talent est reconnu, les compétences. Vous pouvez être sûr qu’un cadre qui a un accident de la vie sera réintégré à son poste dans ces pays. En France on est sur la connaissance et non sur l’éducation ». Une éducation des mentalités pourtant primordiale à l’heure où la loi a été intégrée, mais le handicap de la personne pas suffisamment.

Pauline Marceillac

Publié dans L’EquipeMag